Othello : pourquoi j’ai choisi le noir et blanc
Le vendredi 13 mars, je suis allé voir le spectacle Othello mis en scène par Rémy Jules. Un spectacle intéressant car il intègre comédie, danse, chant et escrime. La scène du conservatoire Marcel Dati à Créteil est assez bien éclairée, les artistes bons et passionnés. Toutes les conditions sont réunis pour faire quelques belles photos.
À la prise de vue, il y en a un certain nombre qui m’ont satisfaites. Mais pour certaines, j’allais un peu déchanter. Le problème, c’est ce satané éclairage rouge !
Ce éclairages sont un problème récurent dans la photo de spectacle. Voici donc un billet pour vous expliquer comment je l’ai contourné, billet qui pourra vous servir si vous êtes confrontés au même problème avec vos photos.
Il est courant d’utiliser des spots rouge dans les spectacles. Les éclairagistes en abusent souvent pour donner une ambiance intimiste. Pour le photographe, le problème de ces éclairages vient de leur température de couleur.
La température de couleur et la balance des blancs
La température de couleur, c’est d’après Wikipedia, une caractérisation de la couleur des lumières qui servent en éclairage, par comparaison à celles d’un matériau idéal émettant de la lumière uniquement par l’effet de la chaleur. Dans la pratique, vous en observez ses effets lorsque vos photos sont jaunes avec un éclairage artificiel ou avec une dominante bleu à la montagne. La température de couleur est exprimée en Kelvin et son dégradé est le suivant.
Le capteur de l’appareil photo enregistre le signal lumineux, c’est le logiciel (que ce soit celui de l’appareil ou celui de traitement de la photo) qui va interpréter ce signal. C’est la balance des blancs.
Bien entendu, la balance des blancs nécessitait d’être ajustée sur toutes les photos de ce spectacle. Sur la photo ci-dessous, la partie haute a subi les traitements de base sans balance des blancs. La partie basse a un peu plus de traitements mais surtout a vu sa balance des blancs réglée. Observez en particulier la robe de Desdemone et les danseuses juste derrière.
Sur cette photo, et sur beaucoup d’autres, je ne suis pas trop embêté. Le problème va venir avec ce redouté spot rouge…
Le rouge, une température de couleur trop basse
Le problème du spot rouge, c’est que sa température de couleur est très basse. La conséquence est que le capteur est vite saturé et les logiciels ne savent pas traiter une couleur de température inférieur à 2000 K. L’autre problème en particulier pour la salle du conservatoire, c’est le mélange des spots, ce qui aura pour conséquence de compliquer le réglage correcte de la balance des blancs. Ainsi, voici la version couleur du duel entre Othello (Rémy Jules)et Brabantio (Philippe Penguy) que je vous avez vu dans l’introduction.
La balance des blancs est réalisée avec en référence la chemise de Philippe Penguy. La partie droite de la photo est bonne, mais sur la gauche, cela n’a pas permis de rattraper la saturation sur le crâne de Rémy Jules.
Être créatif pour publier ces photos
Il est bien entendu hors de question de publier cette photo dans cet état. Mais il serait dommage de la jeter si on peut en tirer quelque chose.
Il est bien entendu possible de rattraper une photo avec des éclairages rouge tout en la gardant en couleur. Ce vieux billet l’illustre bien. Mais ici, il y a un mélange de lumière. Il faudra donc la travailler par zones, c’est à dire dupliquer l’image, travailler les différentes parties et les fusionner. C’est un assez gros travail qui dépend de la complexité de l’image. Pour ma part j’ai préféré conserver une certaine unité avec d’autres cas comme la photo du baise-main d’Othello à Desdemone (Manon Leconte) dont voici l’originale en couleur.
Ici, le rouge est sur les deux artistes. Le reflet est certes le plus intense sur le crâne de Rémy Jules, mais on le voit aussi sur sa veste, dans les cheveux de Manon Leconte et sur sa robe.
Face à l’ampleur du travail sur cette photo, avec un résultat incertain, passer en noir et blanc est certainement la solution la plus simple. Avec un peu d’attention, on arrive à un résultat très satisfaisant, voir, artistiquement intense. Mais attention, il ne suffit pas de faire la conversion en noir et blanc. Il faut encore faire quelques ajustements pour que le noir et blanc soit réellement intense.
Pour réaliser une photo noir et blanc, j’utilise le logiciel Silver Efex de la collection Nik Software. Dans cette collection, il y en a un autre que j’apprécie, c’est Analog Efex. Ce dernier permet des photos plus créatives et j’en avais déjà parlé pour la photo de Sonja Larouge de la troupe Tan Elleil. Othello est une pièce de 1604, on va dire qu’une photo type plaque de verre peut avoir un certain effet. Pour ne pas se contenter d’une image noir et blanc sale, j’ai choisi de conserver un peu de couleur localement afin de mettre en valeur les costumes. Le résultat est le suivant.
Ainsi, du fait d’un éclairage inadapté aux appareils photo, certains clichés ne peuvent pas être montrées dans leur état original autrement que dans un contexte pédagogique comme ce billet. Le travail pour obtenir un cliché satisfaisant dépend de la compétence et sensibilité de chacun. Pour ma part, je préfère l’option noir et blanc, photo à l’ancienne. J’estime que l’intensité et l’émotion peuvent être conservés de la sorte.
Pour résumer, pour de la photo de spectacle, il est important de travailler en format RAW afin de pouvoir retrouver les couleurs les plus fidèles. Certains éclairages vont mettre à mal le capteur et les logiciels d’édition. Il faudra alors faire un travail supplémentaire pour avoir une photo exploitable : soit du travail par zones, soit se tourner vers le noir et blanc ou une combinaison des deux. Pour Othello, j’ai choisi le noir et blanc, mais c’est à chacun d’être créatif.
À propos de... Darko Stankovski
iT guy, photographe et papa 3.0, je vous fais partager mon expérience et découvertes dans ces domaines. Vous pouvez me suivre sur les liens ci-dessous.